Le category management: les 8 étapes structurant l’approche

La gestion d’une catégorie par l’approche du category management est un cycle long. Il peut être optimisé ou réajusté tous les ans et une remise à plat peut être envisagée au bout de trois ans, sauf en cas de chamboulement majeur au sein d’une catégorie qui viendrait remettre en question son fondement même. Les category managers déploient en partenariat avec leurs homologues distributeurs des plans d’actions et de marketing en point de vente pour activer les catégories. Pour ce faire, ils s’appuient sur la méthodologie historique en 8 étapes du category management. Voici une infographie qui résume ces 8 étapes issue de la méthodologie de Brian Harris et de son cabinet The Partnering Group à l’origine de la théorisation de l’approche.

 

infographie 8 étapes category management

1: La première étape en category management définit et délimite le périmètre de la catégorie.

 

Cette première étape est cruciale. Pour ce faire, il est nécessaire de partir des usages et des besoins des consommateurs : pourquoi les consommateurs utilisent ces produits ? quel besoin assouvissent-t-il par leurs usages ?

Si on prend l’exemple des cotons-tiges : leur usage principal reste l’hygiène familiale des oreilles. Néanmoins, certains usages secondaires ne doivent pas être négligés comme le soin des petites plaies ou même le raccord maquillage.

Il est important de bien lister l’ensemble des utilisations et des moments de consommation. Des entretiens qualitatifs de consommateurs peuvent parfois révéler certains usages surprenants ou du moins non ciblés initialement par les produits par les équipes marketing lors de leur lancement.

Par exemple, des boulangers utilisent encore des lames de rasoir pour « grigner le pain » mais ils n’ont pas besoin d’utiliser le manche du rasoir correspondant.

La définition de la catégorie part donc du consommateur et non plus du fournisseur et de ses produits industriels ou de ses services. Ainsi, la catégorie ne s’appelle pas « brosses à dent » mais « hygiène familial buccodentaire ». La catégorie « papier » se subdivise en plusieurs catégories dont « l’hygiène féminine intime », « les soins et couches pour le bébé », « le papier toilette » …

 

La définition de la catégorie a un impact structurant pour le périmètre pris en considération par celle-ci. En effet, plus la définition est large plus les produits complémentaires et substituables sont nombreux et il est donc plus difficile de gérer une catégorie.

Couvrir la catégorie « soin du visage » est beaucoup plus large et complexe que manager la catégorie « démaquillage et toilette du visage » qui exclut tous les produits hydratants, les soins correcteurs, les anti-rides, etc…

Le périmètre d’une catégorie implique des partis pris de la part de l’enseigne mais également de la part du fournisseur. Si un fournisseur n’est pas présent sur un usage de la catégorie ou s’il n’est pas leader, l’intervenant a tendance à écarter cette dimension de la catégorie qui peut être traitée de façon indépendante avec un autre fournisseur. Il peut également inclure des produits de son offre qui sont plus connexes. Un distributeur effectue également des choix en fonction de son positionnement d’enseigne, de ses contraintes logistiques (des produits ambiants et frais peuvent être dans la même catégorie, mais il est plus complexe de les gérer de la même manière à cause de leurs conditions de stockage). De même, afin d’éviter les « méga » catégories trop lourdes à gérer, les fournisseurs et les distributeurs délimitent arbitrairement certaines catégories.

 

Une fois l’ensemble des produits concernés listés, la catégorie est segmentée : les produits sont regroupés par sous-catégorie, segments et sous-segments. Le regroupement des produits se fait à partir de différents critères comme des occasions de consommation (le café du petit déjeuner n’est pas le même que celui pris après le déjeuner ou en fin de journée), du profil des consommateurs (les femmes et les hommes n’ont pas le même type de peau et ne se rasent pas les mêmes parties du corps) et parfois même en fonction des caractéristiques des produits (les lessives peuvent être en poudre, en liquide ou en dose individuelle avec des bénéfices consommateurs différents). La segmentation se construit également à partir de l’arbre de décision du consommateur. Au travers d’une étude consommateur, il s’agit d’identifier les différentes étapes dans la prise de décision de l’achat d’un produit par un client. Pourquoi veut il acheter un produit ? Comment effectue-t-il son choix ? Quels sont ses critères de choix et comment les hiérarchise-t-il ? Quels sont les arbitrages qu’il fait ?

La réponse à l’ensemble de ces questions permet d’établir le cheminement progressif dans la catégorie et donc l’ordonnancement des différents segments.

4 différents rôle d'une catégorie
Définition des 4 rôles qu'une catégorie peut avoir

2: La deuxième étape consiste à attribuer un rôle à la catégorie

Le rôle de la catégorie dépend du positionnement et de l’importance que l’enseigne attribue à la catégorie. Elle s’inscrit ou non dans les priorités et dans l’image d’expertise de l’enseigne sur un univers.

Une même catégorie peut se trouver dans un type de catégorie différent en fonction de l’enseigne qui la commercialise. Ce rôle dépend du profil des clients ciblés par l’enseigne et de l’image qu’elle veut véhiculer sur certains univers qu’elle utilise comme un axe de différenciation par rapport à ses concurrents.

Par exemple les soins du visage constituent une catégorie de destination pour Monoprix alors qu’ils jouent le rôle de catégorie de commodité ou de convénience pour Super U et de catégorie occasionnelle pour Franprix.

3: La troisième étape consiste en l’évaluation de la catégorie

La catégorie est analysée d’un point de vue macroscopique. Il s’agit d’identifier les « insights des consommateurs et des clients », c’est-à-dire les « vérités cachées qui sont majeures dans la compréhension de la catégorie » comme le définit Kantar. A partir de la connaissance et de l’analyse du comportement des consommateurs (leurs attentes, leurs freins, leurs fréquences de consommation et d’achat, leurs usages et attitudes), des enjeux clés peuvent être identifiés : ce sont des obstacles à lever, des nouvelles opportunités à développer, des besoins mal couverts par l’offre actuelle.

Cette étape permet d’entrevoir les grands chantiers et les pistes de croissance sur lesquels s’atteler pour développer une catégorie.

4: L’analyse de la performance de la catégorie constitue la quatrième étape du category management

Cette étape vient alimenter la précédente et confirmer que les enjeux identifiés sont bien des sources de performance ou des risques de contre-performance. Il est important dans un premier temps d’identifier quels sont les données pertinentes à l’analyse pour cerner la performance d’une catégorie : les ventes et leurs tendances par circuit de distribution, par segment, par intervenant… Quelle est la distribution des produits ? Comment se comportent les prix ainsi que la promotion ? Qui achète quoi, quand et où ? Une analyse complète de la situation de la catégorie est nécessaire et doit se faire méticuleusement pour en comprendre son fonctionnement et discerner les probables points d’achoppement. Cette étape est plus microscopique que la précédente et elle vient directement la compléter car elle permet de quantifier plus précisément les segments problématiques ou à potentiel, les évolutions et les changements qui sont intervenus (consolidation de distributeurs ou d’intervenants, échec ou succès de lancement, problématique de diffusion, surinvestissement promotionnel de références, dégradation du prix ou survalorisation…).

5: Une fois ces quatre étapes analytiques effectuées, il est temps de construire la stratégie catégorielle, cinquième étape du category management

Cette étape définit quelle stratégie adopter pour développer la catégorie. Il existe 7 grands types de stratégies. Chaque segment voire sous segment a également une stratégie propre pour contribuer au développement de la catégorie dans son ensemble. Il est même possible d’attribuer un rôle différent pour les intervenants d’un même segment. Par exemple, au sein de la peinture de décoration intérieure, le segment des peintures blanches peut se voir attribuer la mission de développer la fréquentation par les consommateurs de la catégorie du fait de ses fortes rotations, des promotions fréquentes et du poids du segment. D’autres produits comme les aérosols de décoration sont plus facilement identifiés comme une source d’achat d’impulsion pour des petits projets de décoration dits Do It Yourself (DIY) qui nécessitent moins d’investissement en termes de temps, moins de connaissances techniques et moins d’argent.

 

A cette étape il est nécessaire de fixer des objectifs quantifiés d’évolution de part de marché, de taux de pénétration, de développement du panier d’achat, etc… Pour pouvoir suivre l’atteinte du développement de la catégorie dans son ensemble.

7 stratégie en category management

6: A partir des stratégies identifiées pour les segments, la sixième étape permet de construire les plans tactiques.

Les plans d’action opérationnels pour développer une catégorie s’appuient sur quatre leviers d’action complémentaires et qui font échos aux quatre P historiques du marketing produit (Product – Price – Place – Promotion) puisqu’il s’agit de leur adaptation au point de vente: L’assortiment, le prix, le merchandising et la promotion.

Les plans d’action sont issus d’une co-construction entre le fournisseur et l’enseigne car ils apportent de la différenciation dans la commercialisation d’une catégorie entre les différents distributeurs.

7: La septième étape consiste au déploiement et à la mise en place des plans

Le plan d’action peut être développé de manière massive au sein d’une catégorie dans une enseigne lorsque le partenariat est fondé sur une pleine conviction commune et sur une volonté d’agir vite. Néanmoins, des tests sont souvent déployés dans un parc de magasins pour vérifier l’efficacité des plans opérationnels et corriger certains éléments avant la mise en place nationale.

C’est aussi l’occasion pour les centrales d’achat de monétiser un certain nombre d’actions de visibilité via leur régie publicitaire qui développe tout un arsenal d’outils de communication en points de vente et sur leur site.

Le category manager joue un rôle de chef de projet car il est chargé de la coordination entre les prestataires internes (la force de vente, les compte-clés, le marketing…) et les prestataires externes (le distributeur mais également les régies publicitaires et les agences de création ou de développement de la PLV -promotion sur le lieu de vente-). Au cours de cette étape des scorecards de suivi sont donc partagées pour s’assurer du bon déroulement et de l’évolution des différentes actions menées pour accélérer ou corriger certaines étapes.

8: La huitième et dernière étape est l’évaluation de la gestion catégorielle

 Cette dernière étape permet de tirer les enseignements de toute la stratégie déployée pour s’assurer qu’elle a permis de générer de la croissance profitable commune pour le fournisseur et le distributeur. Elle identifie les facteurs explicatifs intrinsèques aux plans ou liés à l’environnement externe qui n’ont pas permis d’atteindre les objectifs fixés.

Cette phase est tout aussi importante que les précédentes car elle permet de définir la suite du processus : faut-il uniquement prolonger la stratégie menée sur la catégorie? Faut-il procéder à des ajustements ou évolutions? Ou bien, est-il nécessaire de remettre complètement à plat la vision de la catégorie pour l’année suivante ? 

En conclusion, ces 8 étapes sont structurantes pour l’approche catégorielle et elles peuvent être un bon guide pour entamer une telle démarche. Néanmoins, je pense qu’un certain recul est nécessaire quant à cette approche. Il ne faut en effet pas oublier qu’elle a été déployée il y a une trentaine d’année, époque où le carrelage, c’est à dire les magasins phyisques de la grande distribution, ne connaissait pas encore l’impact du digital sur tout le modèle de la grande consommation, des consommateurs aux magasins en passant par les marques. C’est son évolution et la prise en considération de la nécessaire transformation digitale de cette approche, sans jeter le bébé avec l’eau du bain, que j’ai proposées dans ma thèse en 2020.

Sources:

Emnos, T. P. (2011). The consumer and shopper journey framework. ECR Community.

 

Olivier Badot, J.-F. L. (2018). Distribution 4.0. Montreuil: Pearson.

 

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